A) Méthodologie du commentaire d'arrêt
Le commentaire d’arrêt est l’épreuve la plus redoutée par l’étudiant : il faut comprendre un langage juridique encore assez obscur, et analyser un arrêt afin de l’interpréter.
Pour réussir cette épreuve exigeante, il faut acquérir et développer :
- des qualités d’analyse, la réussite d’un commentaire d’arrêt supposant une parfaite compréhension de la décision rendue. Le commentaire d’arrêt est le contraire d’une épreuve de récitation. Commenter signifie analyser, expliquer puis juger en tenant compte d’éléments objectifs ;
- des qualités de rigueur pour cerner le problème juridique, ses enjeux et présenter un commentaire structuré et argumenté.
Vous devez également maitriser votre cours, notamment les points sujets à discussion, pour apprécier l’intérêt de la décision ainsi que sa portée, c’est-à-dire ses conséquences juridiques et factuelles.
Pour réussir cette épreuve, entrainez-vous à lire des décisions de justice. Faites régulièrement des fiches d’arrêt en TD, ayez le réflexe de consulter les notes de doctrine et de rechercher systématiquement la jurisprudence et les textes de lois antérieurs et postérieurs à la décision.
Un bon commentaire doit comporter les éléments suivants :
L’explication de la justification de la décision
Il s’agit du sens de l’arrêt, c’est-à-dire de l’analyse détaillée des moyens, des motifs et du dispositif :
L’exposé du droit positif
Le droit positif est défini par l’ensemble des dispositions normatives en vigueur (lois, règlements, décrets) et par la jurisprudence.
Vous devez analyser la conformité de la solution retenue avec le droit positif. S’il s’agit d’une décision ancienne, vous ne la comprendrez qu’en la replaçant dans son contexte historique. Demandez-vous alors si la solution retenue à l’époque a influencé la jurisprudence et les réformes normatives postérieures. Vous en déduirez la portée de l’arrêt qui permet d’apprécier la solution, son intérêt et ses apports dans le domaine juridique concerné, ce qui ouvre sur une discussion critique. Cela suppose une bonne connaissance des notions et des débats relevant du thème abordé.
L’étude de la portée de la décision, autrement dit son impact
Interrogez-vous sur les conséquences juridiques, sociales, économiques et morales de la solution.
Un bon commentaire d’arrêt comporte, quel que soit le plan adopté, l’étude du sens et de la portée de l’arrêt. Commenter suppose d’avoir analysé la décision, de l’avoir comprise, puis d’être capable de cerner le problème et de porter un jugement sur la solution appliquée.
Un commentaire de qualité nécessite par conséquent une préparation longue, progressive et rigoureuse. Soyez concentré et procédez étape par étape.
v L’INTRODUCTION
Le commentaire d’arrêt est une épreuve formaliste où il convient de respecter toutes les règles de fond et de forme si on veut échapper à la catastrophe. L’introduction est primordiale. La négliger est une erreur fatale ! Dès sa lecture, votre correcteur apprécie votre compréhension du problème juridique. L’introduction doit prendre environ un quart du devoir, soit environ une page.
A- Phrase introductive
Elle est destinée à amener le débat sur le terrain de l’arrêt le plus rapidement possible sans toutefois être trop brutale. On peut utiliser à cet effet toute la panoplie des proverbes pour illustrer le fait que le sujet traité est d’intérêt général puisque passé dans le langage courant. Cette phrase permet de susciter l’intérêt du correcteur en présentant et en définissant succinctement le thème principal abordé par l’arrêt.
B- Présentation de l’arrêt
Il faut ici réaliser la jonction entre la phrase introductive qui amorce le sujet et l’arrêt proprement dit.
C- Rappel des faits
Relater les faits, c’est expliquer comment on a pu en arriver à saisir la justice. Il faut le plus possible qualifier juridiquement les faits en les relatant. Il ne faut ici rapporter que les éléments nécessaires à la bonne compréhension de l’arrêt.
D-Rappel de la procédure
Il faut préciser uniquement pour chaque étape, l’auteur, l’objet et l’issue des recours ainsi que la juridiction saisie. Il ne faut reprendre que les éléments disponibles de l’arrêt en taisant les éventuelles informations piochées dans les différentes lectures.
E-Identification des parties
Il faut savoir qui est le demandeur (qui a formé le pourvoi) et qui est le défendeur. Attention à ne pas se tromper. On pourra n’en faire état qu’en invoquant les arguments des parties.
Il s’agit de repérer quels sont les arguments du demandeur au pourvoi car c’est lui qui conteste la solution retenue par les juges du fond. Les arguments du défendeur ne sont presque jamais repris.
Généralement, on peut identifier les arguments différents en observant les séparations effectuées par le biais des « Attendu que ».
G- Problème de droit
C’est là que va se jouer la réussite du commentaire. Le problème de droit est la question juridique qui a été posée à la juridiction saisie par le pourvoi et sur lequel les parties sont en désaccord. Le problème de droit se déduit donc de la confrontation des arguments présentés par le demandeur avec la thèse soutenue par les juges dont la décision est contestée devant la Cour de cassation. Pour le trouver, il faut donc concevoir très clairement le ou les points de désaccord entre les parties. Une solution de facilité consiste à partir du principe que la Cour de cassation répond toujours au problème de droit qui lui est soumis, et qu’il suffit de déduire de la solution le problème qui se pose. C’est en effet exact dans 90% des cas, mais il y a un risque terrible de passer à côté de l’arrêt. En effet, il arrive que la Cour de cassation ne réponde pas au problème de droit et réponde à une question qui n’est pas posée (on parlera alors d’obiter dictum). Le commentaire ne réside plus alors dans la critique de la solution apportée pour résoudre le problème du droit, mais dans le fait de comprendre pourquoi la Cour de cassation n’a pas répondu à la question qui lui était posée.
H- Solution de l’arrêt
Rappelez à l’aide du dispositif et des motifs, la solution retenue et l’interprétation juridique effectuée. Vous pouvez, le cas échéant, citer l’attendu de principe entre guillemets.
I-Annonce du plan
Ou on choisit le classicisme en écrivant « nous verrons dans une première partie… et dans une seconde… », ou on se permet d’annoncer plus discrètement son plan « cet arrêt nous montre que les juges ont entendu faire des catégories définies par le Code civil une stricte application (I), l’arrêt illustre bien l’étroitesse des catégories du Code civil et le caractère inéluctable de la solution retenue (II) ».
v LE DEVELOPPEMENT
En présence de plusieurs problèmes juridiques intéressant le thème de la séance et/ou le programme de l’année, on consacrera une partie à chaque problème. Il faut rappeler que lorsqu’un problème juridique ne fera pas l’objet de commentaires particuliers, il conviendra de l’évacuer dans l’introduction après s’en être expliqué.
En présence d’un problème juridique, on pourra suivre la méthode suivante.
La première partie exposera la solution commentée de manière neutre et la seconde partie critiquera la solution en réfléchissant sur ses implications juridiques, pratiques ou morales, soit :
I- Apport de la solution (premier degré de lecture objectif) :
A. Situation du problème juridique
1. Analyses de textes applicables
2. Analyse du problème d’interprétation
B. Solution retenue par l’arrêt
1. Présentation de la solution
2. Explication de la solution
II- Critique de la solution
La partie critique (II) peut se présenter de différentes façons :
Pour terminer, il convient de remplacer l’intitulé type par un intitulé centré sur le sujet. Il est recommandé :
- d’éviter les verbes conjugués dans les titres
- de préférer des titres de même gabarit